Los Glaciares
Plusieurs personnes m’avaient prévenu qu’il fallait absolument aller voir le perito moreno si on passait en patagonie. A ce nom j’associais des images de glacier surplombant un lac et duquel tombent de gros blocs de glace, plongeant dans l’eau avec un fracas digne d’un coup de tonnerre.
En fait Perito Moreno était le surnom de monsieur Moreno. Un expert chargé de définir les frontières avec le chili suite à la conquête du désert, c’est à dire de la patagonie. Son surnom est dû au fait que “expert” se dit “perito” en espagnol et sa popularité vient de son travail qui a permis à l’argentine d’obtenir des territoires revendiqués. Il a notamment détourné le cours d’une rivière pour qu’elle rejoigne l’océan atlantique plutôt que le pacifique à une époque où la frontière était déteminée par la ligne de partage des eaux.
Etant un peu une sorte de héros national, Perito Moreno a vu son nom attribué entre autres à une rivière, une ville, un parc national et un glacier. Et pour ne pas simplifier les choses le glacier en question ne se situe pas dans le parc national homonyme mais dans un autre nommé los glaciares. C’est pourquoi les argentins ne parlent pas du perito moreno mais du glaciar moreno, histoire de bien faire la distinction avec tout le reste.
N’ayant entendu dire que du bien de ce que nous allons voir, j’ai un vieux réflexe qui me fait m’attendre au pire. Comme ça au mieux je suis très agréablement surpris, et au pire je peux toujours dire: “je l’avais bien dit”. Et en arrivant à el calafate, la ville d’où partent les excursions vers le parc, nous avons un avant goût du pire. La ville n’a qu’une seule ressource: le tourisme. Mais contrairement à puerto natalès au chili qui a l’air un peu endormie, el calafate a son lot de boutiques de bibelots, de boites de nuit et autres casinos. Il faut dire qu’on approche ce qui se fait de mieux en terme d’extrème accessible. Il y a un aéroport et les deux principaux centres d’intérêts se visitent en bus ou en catamaran de deux cent places.
Effectivement dès la première sortie c’est l’horreur, on part dans un bus rempli à moitié de bacpackers qui s’exclament “oh my god!” ou “oh jesus!” quand ils voient un glacier. Pour l’autre moitié il s’agit de grabataires un peu moins bruillants mais qui ne laissent rien présager de bon quand à la possibilité de se ballader une fois sur place. Il n’y a d’ailleurs pas plus de cinquante mètres entre le parking sur lequel nous dépose le bus et le ponton auquel est accosté le catamaran. Le second jour sera similaire si ce n’est que le bateau est plus grand et que compte tenu du coût plus élevé il n’y aura plus qu’un quart de backpackers.
Bien que la cohue touristique ne restera pas gravée dans nos mémoires, elle génère une réflexion intéressante puisque après tout nous sommes des touristes comme les autres. Quelle forme de tourisme nous satisfait le plus? Est-ce un tourisme de masse inévitable pour visiter certains sites grandioses ou au contraire un tourisme à petite échelle dans des endroits peut être moins spectaculaires mais qui ont su conserver leur charme, où les relations humaines ne sont pas dénaturées par le passage d’une harde touristique? Bien sur j’aurais instinctivement tendance à préférer la seconde forme, mais je prend aussi du plaisir à me retrouver dans des endroits tellement impressionnants qu’il faut savoir les partager avec les autres. En somme, il y a un équilibre difficile à trouver au quotidien d’un voyage qui restera unique pour nous.
Pour le glaciar moreno les images que j’avais en tête correspondent bien à la réalité, même si dans un premier temps le glacier me semble petit. Les grondements sont impressionants mais je ne prend la mesure du lieu que quand un énorme bloc de glace s’affaisse dans le lac, faisant jaillir d’immenses gerbes d’eau avant de faire onduler la surface. La taille des vagues et leur lenteur à se propager me rappelle que le glacier culmine à soixante mètres au dessus de l’eau et que nous sommes à plus de deux cent mètres alors qu’on avait l’impression de n’être qu’à quelques encablures.
Après le tour en bateau on va sur les passerelles en face du glacier. De là on on se rend bien compte des distances mais on ne remarque plus l’amplitude des vagues. Par contre on distingue mieux l’étendue du glacier. Il descend lui aussi entre les montagnes depuis le campo de hielo sur. Et vient s’écraser devant nous contre la coline sur laquelle nous sommes, séparant ainsi le lac en deux. Ce barrage naturel va faire monter le niveau dans la partie amont jusqu’à ce que la pression soulève légèrement le glacier et permette à l’eau de s’écouler en aval. Petit à petit elle va éroder la glace et former un canal sous une arche qui s’éfondrera à la fois sous son propre poids et la pression du glacier. Mais pour le moment on n’aperçoit qu’une petite crevasse sous la glace et le niveau en amont est relativement bas.
Pendant que nous regardons la surface déchiquetée du glacier un condor apparait, semblant surgir de nule part et dans son vol silencieux passe entre nous et le glacier avant d’aller se perdre au loin, là où les rayons du soleil viennent se poser sur la neige des montagnes et l’eau du lac dans un éblouissement de nacre comme on en voit parfois accrochés aux murs des restaurants asiatiques. Cet instant là, magique comme tant d’autres au cours de notre voyage, justifie à lui seul notre passage par ici.
Le lendemain, nous parcourons le lac argentino à bord d’un gigantesque catamaran pour admirer d’autres glaciers, chacun ayant sa spécificité. Plus que les glaciers eux mêmes nous avons regardés les berges, creusées dans la roche par le glacier qui a laissé sa place au lac depuis la dernière glaciation. Et surtout les icebergs impressionnants détachés du glacier upsala. Avec leur taille gigantesque, leur forme improbable ou leur bleu profond ils offraient tous un intérêt participant au plaisir de la journée.
6 mai 2008 à 22:56
Ah ben oui, c´est sur c´est plus long que de se bruler la lèvre avec du maté. Mais là au moins il y a des photos.
8 mai 2008 à 11:37
Et c’est toujours aussi intéressant et agréable de vous suivre. J’aime assez la petite réflexions sur “les” tourismes, et je suis assez de cet avis, même s’il faut vraiment que je me fouette pour supporter plus de 10 personnes autour de moi.
Bises à vous deux
9 mai 2008 à 14:22
thomas, ne veux-tu pas interrompre la publication de tes articles ?!! Parce que ça commence à me rendre jaloux toutes ces descriptions detaillées; sans parler des photos, ou l’on ne voit même pas la foule touristique. J’ai essayé de perdre l’adresse du site, mais même mon navigateur ne veut plus échapper à la visite quotidienne !
Bises
9 mai 2008 à 21:23
@Nico: C’est l’avantage d’un long voyage, si l’équilibre est difficile à trouver au quotidien on arrive quand même à alterner sur la longueur et à éviter le gros du monde en restant le plus possible “hors saison”.
@loic: Pour les articles ce n’est pas possible, j’y ai trop pris goût. Et pour les photos si tu savais le temps que ça me prend d’effacer les touristes un par un tu ne t’en pleindrais pas.
Bises à vous et aux votres.